La Turquie minée par des contradictions internes

La Turquie sera bientôt transformée en république présidentielle. On dirait que le peuple turc soutient le président Recep Tayyip Erdogan. Les manifestations pour le renforcement des pouvoirs présidentiels ressemblaient plutôt à des réunions religieuses. Mais en réalité, le pays est miné par les contradictions internes.

Cependant, 50 % des Turcs considèrent le président du pays comme un despote et se prononcent contre la présidence Recep Tayyip Erdogan. De plus en plus de ses partisans s'opposent aux idées du président. Certains étaient convaincus qu'un grand nombre de Turcs diraient « non » au renforcement des pouvoirs d'Erdogan, a écrit l'observateur du journal allemand Der Spigel Maximilian Popp.

L'ex-président Turc Abdullah Gul remplacé par Recep Tayyip Erdogan a quitté la politique après sa retraite. Mais quelques jours avant le référendum du 16 avril, l'opposition conservatrice espérait qu'il pourrait changer la donne, alors que certains médias proches du gouvernement l'ont qualifié d'un traître pour ne pas avoir assisté à une manifestation organisée par le Parti de la justice et du développement (AKP) le 1er avril dans sa ville natale de Kayseri (centre de la Turquie). Selon le journaliste allemand, le silence de l'ex-président montre le caractère controversé des amendements à la constitution du pays.

Selon Recep Tayyip Erdogan, son avenir remonte aux résultats du référendum constitutionnel. Les amendements soumis à la consultation nationale lui accorderont des pouvoirs plus larges que ceux de Mustafa Kemal Ataturk.

Le président turc sera capable de nommer les ministres, les 12 des 15 juges constitutionnels et de dissoudre le parlement. Le poste de premier ministre sera supprimé. L'armée sera mise en arrière-plan. Selon M. Erdogan, cette réforme est nécessaire pour « assurer la prospérité et la stabilité du pays ».

Le président a recouru à toute son administration, à la police, à la justice avant le vote, ce qui lui a permis de « remporter » ce référendum.

Selon un sociologue turc Kemal Ozirkaz, l'AKP n'avait pas suffisamment d'arguments pour convaincre les Turcs que la réforme était nécessaire.

Il y a longtemps, Recep Tayyip Erdogan a été considéré par la population comme réformateur. Au début de sa carrière au gouvernement, un grand nombre de représentants du mouvement islamiste Millî Görüş, des musulmans modérés qui s'opposaient au régime militaire turc, le suivaient.

Mais le but d'Erdogan est d'introduire un régime ressemblant à l'autocratie. Et pour atteindre ce but, il est prêt à sacrifier ses alliés. L'AKP, qui était à l'époque un parti du peuple, s'est transformé en un agent du président. Il n'y a pas de place dans ce parti pour les forces modérées libérales indépendantes.

Nombreux sont ceux qui se sont détournés du président. Il s'agit d'Abdullah Gul, de l'ex-premier ministre Ahmet Davutoglu et de l'ex-vice-premier ministre Bulent Arinc. La majorité des fondateurs de l'AKP ont quitté le parti, alors que son programme remonte aux forces les plus radicales du pays parmi lesquelles est le maire d'Ankara Melih Gokcek qui s'en prend toujours aux activistes de l'opposition et aux journalistes sur son compte Twitter.

Comme le président, le maire d'Ankara est sûr que la Turquie est entourée d'ennemis alors que l'Europe envisage d'abandonner le gouvernement turc. La Turquie tente d'adhérer à l'Union européenne mais Bruxelles ne fait que rejeter le pays. « Vous insultez Erdogan en le qualifiant de dictateur car le gouvernement turc se soumet à la volonté du peuple », a déclaré M. Gokcek dans une interview.

Cet avis du maire de la capitale est partagé par le président qui qualifie toujours les Européens de fascistes. Ses slogans antieuropéens visent à attirer les nationalistes.

51,18 % des Turcs ont voté pour les amendements à la constitution de la Turquie élargissant les pouvoirs du président Recep Tayyip Erdogan.

Rappelons que la Turquie a critiqué la position russe envers la Syrie. Erdogan a souligné espérer que la Russie rejoignait les États-Unis et arrêtait à protéger le président syrien Bachar el-Assad.

La position de la Turquie a déjà été commentée dans une interview accordée à Pravda.Ru par Aydin Mekhtiev, politologue, membre correspondant du Centre d'études diplomatiques et stratégiques de Paris (CEDS).

« La position turque ne change pas dès le début du conflit en Syrie. Le président turc Erdogan insiste toujours sur le fait que le régime de Bachar el-Assad est illégal alors que le dirigeant syrien doit être destitué. L'incident avec un chasseur russe abattu par la Turquie, qui a eu lieu en novembre 2015, a empiré les relations russo-turques ce qui a obligé Ankara à faire des concessions dans la question syrienne pour normaliser les rapports bilatéraux. Ainsi, la destitution d'Assad a été levée de l'ordre du jour par la Turquie », a déclaré l'expert.