Le speaker du parlement de la République Autoproclamée de Transnistrie Vadime Krasnoselsky s'est fait élire président. Selon l'agence RIA-Novosti citant la Commission Centrale du Vote de Russie, Kranoselsky aurait reçu plus de 62 % de votes au dépouillement des scrutins électoraux. Son adversaire principal Evguéni Chevtchuk n'en a collecté que 28 %.
Les observateurs de la Douma de Russie n'ont trouvé rien à redire sur le processus du vote qui s'est déroulé en bonne et due forme. Le compte-rendu a été présenté par le chef de la délégation russe Artiome Tourov qui a fait valoir que les observateurs étaient venus en force ce qui ne fait que rajouter à la légitimité du processus électoral.
Sergheï Lavrenov, docteur ès sciences politiques, chef de section Transnistrie et Moldavie de l'Institut des pays de la CEI, nous a livré son commentaire.
- La Russie reconnaît les élections du président de Transnistrie... Quelles pourraient en être les conséquences à tirer pour la Russie et la Transnistrie ?
SL. Il n'y avait pas de contexte géopolitique aux élections. Tous les candidats y compris Chevtchuk et Krasnoselsky ont reconnu la portée des relations entre la Transnistrie et la Russie. C'est pourquoi il ne faut pas s'attendre à des soubresauts inattendus en cette direction.
Mais, ce qui est autrement plus important, il faut réfléchir à des scénarios économiques qui se compliquent à cause des restrictions appliquées par la Moldavie et l'Ukraine. C'est un sujet gravissime !
En gros, tous les programmes des campagnes des candidats portaient sur le développement intérieur en Transnistrie. Il y va, avant toute autre chose, des mesures de protection des démunis dont les salariés des sociétés publiques, les retraités et la jeunesse.
C'est qu'au cours de 18 derniers mois, 40.000 jeunes à peu près auraient fui la république. Ces gens représentent l'avenir de notre pays. Ce qui veut dire qu'il faut créer des conditions viables pour pouvoir les fixer au sol afin qu'ils veuillent pour de bon construire leur vie en Transnistrie.
- Ce qui veut dire que la campagne de Krasnoselsky était axée sur un contenu social ?
SL. Il traitait a priori d'une plus grande légitimité des décisions étatiques et de l'instauration d'un contrôle public sur l'exécutif. Nous savons qu'au cours de la dernière année, à plusieurs reprises le Conseil Suprême présidé par Krasnoselsky a critiqué l'administration de Chevtchuk et le gouvernement pour des décisions, au plus bas mot du terme, injustifiées. On demandait aussi que les rectificatifs soient apportés.
- Comment caractériseriez-vous Krasnoselsky ? Aurait-il vraiment le courage d'aller au bout de ses réformes ?
SL. Difficile à dire maintenant. Il s'agit d'un jeune homme plein d'allant. A mon sens, il est sincère dans ses aspirations et il entend vraiment réaliser son programme très complexe et à une très grande échelle.
- Existe-t-il des moyens financiers pour soutenir les couches non-protégées de la population ?
SL. Il faudrait incontestablement des réserves en interne. Il est de notoriété publique que la Russie octroie une forte aide financière. Mais il faudrait, avant autre chose, trouver des réserves pour faire monter le chiffre du commerce extérieur. C'est un problème majeur.
- Quels pourraient être les grands axes du développement des relations entre la Russie et la Transnistrie ?
SL. Il s'agirait de la métallurgie, du textile, des machines et outils. La Transnistrie prend activement part au programme du remplacement de l'import suite aux sanctions économiques imposées par l'Occident. Cette coopération prévoit également la participation de la Moldavie. A Chisinau, une commission russo-moldave s'est réunie la semaine dernière pour débattre des programmes de coopération économique. Cet échange s'était effectué en présence de notre délégation qui a été invitée, elle aussi.
- Donc vous ne croyez pas que Chisinau va nuire au développement des relations entre la Transnistrie et la Russie ?
SL. A son tour, Chisinau est en train de vivre la période des vaches maigres. Les Moldaves sont très attirés par l'idée de faire écouler leurs produits sur le marché russe. J'estime que le progrès y est inévitable.
Il est à rappeler que la Transnistrie s'est proclamée indépendante au début des années 90. La Russie la soutient à la hauteur d'1 milliard de dollars à titre annuel. Le chef du Parlement Mikhaïl Bourla s'est adressé à son homologue russe Sergheï Narychkine en lui demandant la réunification de la Transnistrie avec la Russie. En 2006, le référendum populaire a donné 97,2 % de voix en faveur de la fusion avec Moscou. Les parlementaires de la Transnistrie ont déjà fait voter une loi constitutionnelle sur la reconnaissance de la législation russe comme partie de la législation nationale de la République autoproclamée. La langue officielle est le russe. 200.000 citoyens russes habitent la Transnistrie.