Ils étaient encore 50.000 en 1970. En 2020 ils ne seront plus que 6.000 dont moins de 3.000 prêtres actifs, c'est-à-dire âgés de 75 ans ou moins. Les estimations varient, et donnent de 2000 à 3500 prêtres actifs d'ici trois ans. Ces seuls chiffres illustrent l'étendue du déclin de l'Eglise en France, brisée dans son élan par des évolutions sociales qu'elle n'a pas su anticiper et par un concile Vatican II très mal digéré.
Dire qu'en 1789, la France qui n'avait que 25 millions d'habitants avait 80.000 prêtres ; la messe dominicale était suivie par 95% des Français. Et la totalité des enfants était baptisée. Aujourd'hui, c'est 10% à Saint-Denis, 17% à Pontoise, rappelle RéinformationTV, mais jusqu'à 75% encore à Saint-Flour, ville-évêché du Cantal, où la population est culturellement plus homogène.
Parmi ces 2000 prêtres, la Tradition - respect de la liturgie tridentine, port de la soutane et messe en latin - aura une place croissante. Outre les apparences, ce seront aussi des prêtres pour lesquels le mode de vie catholique, la théologie et la défense des valeurs aura plus d'importance. L'année 2020 c'est après-demain.
L'Eglise y sera numériquement moins imposante, mais peut-être enfin décomplexée, prompte à défendre ses valeurs, à se mobiliser y compris dans le champ politique, à réaffirmer ses vérités pluriséculaires, à défendre entièrement le message du Christ, à se débarrasser des compromis et compromissions (enseignement soi-disant catholique sous contrat complètement assujetti à l'Etat, presse soi-disant catholique qui n'est qu'un relais de la bien-pensance gauchiste et libérale, prélats soi-disant catholiques mais qui n'ont de cesse de détruire ce qui reste de l'Eglise etc.). Bref, elle se libérera des progressistes responsables de son déclin - qui n'ont guère pu se renouveler - et ce sera pour le mieux.
D'ici 2024, les diocèses français perdront (au moins) un quart de leurs prêtres
Cependant, le temps que la Tradition ensemence à nouveau la terre et que les fruits soient moissonnés, ce sera dur. Dans certains diocèses ça l'est déjà. Aujourd'hui, en Lozère, il y a 35 prêtres en activité dont 5 de moins de 60 ans pour cinq paroisses très étendues. En Creuse (diocèse de Limoges), c'est encore pire : 7 prêtres actifs (11 en tout) pour 6 paroisses. En 2020, ce seront probablement des déserts religieux. A Agen il y a 61 prêtres incardinés, mais 27 seulement sont actifs.
La Croix a publié en 2014 la carte du nombre de prêtres en France, par diocèse. Le journal réputé proche de l'épiscopat français, et d'ancrage centre-gauche, prévoyait alors 4257 prêtres actifs en 2024. Un constat partiellement biaisé puisqu'il compte les 664 séminaristes actuellement formés dans les diocèses, et dont une partie n'arrivera pas au terme de la formation. « Les diocèses français perdront en moyenne un quart de leurs effectifs de prêtres actifs, d'ici à 2024 », note le journal.
En revanche, quatre diocèses affichent un solde positif : Avignon (+ 20 %), Fréjus (+ 15 %), Versailles (+ 7 %) et Chartres (+ 4 %), soit parce qu'ils accueillent des communautés extérieures - et notamment traditionalistes, comme dans les diocèses de Versailles, Fréjus et Chartres, soit parce qu'ils gardent un fort ancrage catholique. A Créteil et au Havre, le nombre de prêtres actifs devrait rester stable, et ne diminuer que très légèrement à Moulins.
A Auch, il y a aujourd'hui 19 prêtres actifs, il en restera 11 en 2024, d'après les projections de la Croix. A Pamiers, il passeront de 16 à 13. A Digne, de 14 à 11. A Langres, de 13 à 12. A Quimper, le nombre de prêtres sera divisé par deux, tombant de 92 à 42. A Viviers et Rodez, il restera dans en 2024 moins d'un tiers des prêtres qui y sont actuellement, soit 13 prêtres (contre 38 en 2014) et 15 (contre 45 en 2014) respectivement. A Châlons, ils sont 20 prêtres actifs aujourd'hui, ils seront 8 en 2024. A Belfort-Montbéliard, ils passeront de 25 à 9. A Mende, de 25 à 11. A Saint-Claude, de 33 à 14. A Nevers, de 24 à 17. A Blois, de 35 à 20.
Ce qui est déjà insuffisant aujourd'hui va devenir impossible à faire. Les grandes villes ne seront du reste pas épargnées. A Nantes, les prêtres diminueront de moitié, de 148 à 75, et à la Rochelle, de 104 à 45. Nombre de diocèses risquent d'être rayés de la carte de France. Voilà le bilan de cinquante ans de modernisme et d'une Eglise de France à plat ventre devant les ennemis de la Foi.
Ce que les Huns, les Sarrasins, les guerres civiles de religion, la Révolution et ses persécutions anti-religieuses n'auront pas réussi à faire, une génération de prélats courant derrière la respectabilité et de prêtres abandonnant soutane et messe pour faire peuple ont réussi à obtenir. La ruine quasi-totale de l'Eglise de France.
Quasi-totale, car il y a encore de l'espoir.
De moins en moins de diocésains ordonnés et de plus en plus de tradis
En 2015, 120 prêtres ont été ordonnés dont 68 diocésains. En 2016, 100 prêtres seulement - dont 20 à peine pour les communautés religieuses, et 79 diocésains ; 22 diocèses seulement connaîtront des ordinations. Pendant ce temps là, 800 prêtres seront morts. Un déséquilibre chiffré qui traduit mieux que de longues explications l'état de l'Eglise en France.
Ces chiffres ne comptent pas cependant les ordinations faites par les instituts traditionnels. En 2016, la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre (ralliée à Rome) a ordonné 6 prêtres français dont 4 à Auxerre. En 2015, ce sont quatre prêtres français qui ont été ordonnés en Allemagne. L'Institut du Bon Pasteur - nettement plus présent à l'étranger qu'en France contrairement à la plupart des autres institutions traditionnelles, bien que son séminaire soit, lui, en France (Courtalain) - a ordonné un prêtre français en 2016 à Bordeaux. L'ICRSP (Institut du Christ Roi Souverain Prêtre), dont le séminaire est en Italie, a ordonné en 2016 8 prêtres français, et 11 dont une majorité de français en 2015.
Insoumise à Rome (pour l'instant) mais disposant d'une reconnaissance partielle, la FSSPX (Fraternité Sacerdotale Saint Pie X), institution historique de la Tradition, a ordonné en 2016 7 prêtres français, dont deux religieux, à Ecône, et un autre à Saint-Nicolas du Chardonnet à Paris. En 2015, 9 prêtres français dont deux religieux ont été ordonnés à Ecône.
Ce sont donc 23 prêtres traditionalistes qui ont été ordonnés en 2016, et une grosse vingtaine en 2015. Ce qui représente bon an mal an un cinquième des ordinations totales en France, et un tiers des ordinations issues des séminaires diocésains. Ces prêtres sont jeunes, et sont pour partie appelés à servir dans les diocèses - c'est le cas des prêtres de l'ICRSP, de l'IBP et de la FSSP, qui disposent de paroisses attribuées dans les diocèses, tandis que la FSSPX dispose de ses propres paroisses (et écoles) qui sont en plein boom.
Les traditionalistes ont rejeté les orientations mortifères du modernisme religieux catholique. Résultat des courses : le denier du culte et les ordinations sont restées aux niveaux d'avant-Concile, tandis qu'elles se sont effondrées dans les diocèses. Quand les tradis ont des écoles, elles sont vraiment libres, car elles s'affranchissent des programmes de l'Etat auquel est lié l'enseignement « catholique » diocésain qui n'ose plus affirmer sa vocation historique. A travers l'archipel de la Tradition - familles, cercles d'activités, œuvres sociales, établissements scolaires, chapelles, paroisses, revues etc. se maintient et renaît une conscience catholique française.
En 2020, les tradis seront incontournables. Supporteront-ils des prélats mous, acquis à la bien-pensance gauchiste et qui n'osent s'affirmer clairement catholiques et défenseurs du Christ ? Sûrement pas. Il faudra alors rebâtir la chrétienté française, en commençant par les diocèses où s'est fortifiée la Foi d'une nation, fille aînée de l'Eglise, toujours prête à défendre les lieux Saints et les chrétiens du monde entier : Soissons, Langres, Sens, Nevers, Bourges, Viviers, Mende, Cahors, Luçon, Rodez ou encore Saint-Dié sont parmi les plus mal en points.