Devant des candidats peu inspirants et l'échec successif de la « droite » (2007-2012) puis de la « gauche », les français, tous horizons confondus, semblent s'être donnés comme mot d'ordre « sortez les sortants ». Malgré une impression persistante de surréalisme, tant les enjeux de la primaire de gauche semblent éloignés des misères quotidiennes du peuple français, cette dernière n'a pas fait exception. Avec trois victimes collatérales, Montebourg, Valls et Peillon.
La participation est bien en-dessous des espérances. Avec 1,5 million de votants, le PS rentre tout juste dans ses frais. Et encore, si ce chiffre est atteint : à 23h20 il y avait 1 337 820 votants comptabilisés sur 80% des bureaux de vote. Cela dit, ce chiffre est suspect car certains électeurs ont pu voter deux fois, et l'ont fait savoir. Cependant le PS reste ridicule, tant par rapport à la primaire de gauche en 2011 (2,6 millions de votants) qu'à celle de la droite en 2016 (4,4 millions de votants). La participation, ou plutôt son absence, confirme que le peuple vote avec les pieds : la tendance générale, en France, est favorable à un basculement du pouvoir exécutif à droite, et même vers une droite plutôt dure que vers le centre-droit.
Valls, qui se voyait adoubé par le « peuple de gauche », n'est que second, avec 31% des voix selon des résultats partiels. C'est Benoit Hamon, candidat d'une gauche décomplexée et dépensière, qui est en tête à 36 %. Faire un programme aux coûts limités, se donner une stature de présidentiable ? Très peu pour lui. Il a promis du pain et des jeux - enfin du shit et des allocs -, et laissé faire ses rivaux qui lui ont tapé dessus à bras raccourcis.
Parmi les points clés de son programme : créer un revenu universel distribué à tous (et alourdir ainsi les finances pour 300 milliards d'euros supplémentaires), légaliser le cannabis, la PMA pour les homosexuelles, l'euthanasie, la fermeture des centrales nucléaires en fin de vie (soit un bon tiers du parc français), abroger la loi Travail, réduire encore (!) la durée du travail hebdomadaire, revaloriser le SMIC de 10%. Le tout, sans aucun cadre budgétaire. Au diable les économies ! Les petits entrepreneurs, les paysans et les classes moyennes paieront, eux qui n'ont pas les moyens de défiscaliser ou de fuir en Suisse.
Il n'y a du reste, contrairement à ce que relatent d'une même voix les médias mainstream, aucune « rupture » avec le quinquennat écoulé (sauf sur la loi Travail) : le n'importe quoi social, saupoudré de laxisme et d'interventionnisme étatique tous azimuts, continue gaiement, et ce sont toujours les mêmes qui paient, puisqu'ils votent (généralement) mal.
Le succès de Hamon est présenté comme une surprise par les médias, qui avaient choisi Peillon et Montebourg pour s'opposer dignement - et s'incliner - face à Valls. Mais il reste à savoir si c'est le programme socialement délirant et laxiste de Hamon qui a séduit, auquel cas le « peuple de gauche » est à des années-lumières du peuple français dans son ensemble - et ça, pour le coup, c'est une vraie surprise, ou c'est un tout autre désir qui a dominé les débats.
Comme pour les primaires de droite, il est fort probable que de nombreux électeurs des primaires de gauche, particulièrement au sein des sympathisants de gauche qui n'ont pas supporté un quinquennat désastreux et la Loi Travail, n'y soient allés que pour voter contre Valls. Et infliger ainsi une motion de censure citoyenne au gouvernement, et, par ricochet, à Hollande. Comme les électeurs de droite sont allés voter contre Sarkozy, puis contre Juppé. Le caporalisme étant plus fort au sein du PS, il faudra aux électeurs de la primaire deux fois sur le métier remettre l'ouvrage.
Montebourg et Peillon sortis du jeu
Il se voulait le sauveur de la gauche, c'est raté. Montebourg, avec 17%, tombe de haut. Malgré un programme cohérent, il se retrouve victime du « tout sauf Valls » qui a consacré Hamon en meilleur opposant. Mais en appelant d'ores et déjà à voter pour ce dernier, il entraîne Valls dans sa chute. Peut-être, s'il ne s'était plié au jeu de massacre de la primaire et osé la rupture franche, à l'instar de Macron ou de Mélenchon, aurait-il encore un avenir politique... Quant à l'apparatchik Peillon, le soutien des Loges n'aura pas suffi. Malgré des médias complètement acquis, il dépasse à peine les 6%.
Les petits candidats (De Rugy, Pinel, Bennahmias) sont dans les limbes ; Sylvia Pinel a fait 2%, Bennahmias à peine 1% : même s'ils ont déjà annoncé ou fait comprendre leur ralliement à Valls, cela ne change rien. De Rugy (3,81%) semble avoir compris la tendance et n'a pas donné de consigne de vote - ce qui intéresse ce nantais, c'est son avenir politique, un éventuel poste de ministre ou une place plus chaude que celle de député d'une circonscription (44-1) sociologiquement de droite, même si le PS a renoncé à présenter un candidat contre lui, pour le remercier d'avoir quitté les Verts et être resté fidèle à la ligne générale de Hollande. Reste à se demander, pour le peuple français, qui représentent-ils vraiment, ces petits candidats, et pourquoi dévorent-ils à pleines dents, et depuis des années pour certains d'entre eux, l'argent du contribuable.
Un boulevard s'ouvre cependant pour la droite, avec un Hamon très à gauche qui risque de neutraliser Mélenchon sur le plan des promesses démagogiques qui font rêver une certaine jeunesse, et peut-être pour Macron qui se retrouve face à un vide au centre, alors qu'habituellement c'est le trop-plein.
Par ailleurs, quel que soit le vainqueur de dimanche prochain, aucun des deux n'arrivera au second tour, selon un sondage IPSOS-Steria diffusé ce dimanche soir. Manuel Valls est crédité de 9% d'intentions de vote, bien derrière Marine le Pen, (27%), François Fillon (25%), Emmanuel Macron (18%) et Jean-Luc Mélenchon (15%). Benoît Hamon ferait, lui, 8%. Plus dure est la chute...