Washington veut dynamiter l’Europe du Sud

L'académicienne et sénatrice nous a confié que cette manoeuvre pourrait réussir parce que, pour les Américains, leur présence en Europe est vraiment en jeu. Il se trouve que les bases qu'ils ont fait installer en Allemagne sont sous le mandat à durée déterminée. Alors, quand le contrat arriverait à son échéance, les Américains auraient plus d'une corde à leur arc. Quand bien même ils se feraient chasser de l'Europe Centrale et Occidentale, ils pourront toujours se rabattre sur l'Europe méridionale, avec le Kosovo. Peu importe pour eux si l'islamisme sectaire triomphe dans cette partie du Globe. Leur jeu géostratégique passe bien par-dessus nos « petites » querelles de clocher au niveau européo-régional.

Il y a 35 ans, le président américain Ronald Reagan accusait l'URSS d'être le soi-disant « Empire du Mal » . Quoi qu'on dise de l'Union Soviétique, elle était plutôt affairée à régler ses propres problèmes, sans s'étendre à travers le monde (je ne parle pas de l'Afghanistan dont le bilan soviétique s'est avéré plusieurs fois moins désastreux pour la population locale que les années du règne anglo-saxon). En revanche, depuis qu'ils ont accédé au pouvoir, à partir de la Seconde Guerre mondaile, les Etats-Unis, eux, font surtout de la projection des forces bien loin de leurs frontières respectives se trouvant, à ma connaissance, sur un autre continent.

Inutile de me parler de la conjoncture de la Guerre Froide, car, pour ceux qui l'ont accidentellement oublié, la France, en tant qu'Etat souverain, a été plaidée par Joseph Staline le lendemain de la Seconde Guerre mondiale. En effet, les Américains avaient tendance de ne pas considérer les Français comme vainqueurs de la Seconde Guerre Mondiale en accusant systématiquement la France de collaborationisme avec les Alliés de l'Axe.

Ils proposaient de maintenuir un commandement militaire à Paris, à l'instar de ce qui fut fait en Allemagne. Donc, Staline n'avait aucune envie d'envahir l'Europe Occidentale, mais les officiers allemands ont mené des négociations secrètes avec Churchill et Roosevelt proposant de créer une force unie contre les Bolchéviques ce qui équivalait, géographiquement parlant, à la Russie de cette époque. Compte tenu du fait que les Allemands étaient à deux pas de la création de l'arme nucléaire et avaient déjà à leur disposition des bombardiers stratosphériques volant à l'altitude suborbitale, à la vitesse proche du Mach 1, il était parfaitement envisageable d'organiser la débâcle de l'Armée Rouge avec l'apport des connaissances et de la force vive du contingent du Troisième Reich.

Je ne veux pas réveiller les vieux démons, mais ces faits devraient bien prouver que la présence américaine sur le sol européen n'est aucunement due à la menace soviétique mais à un plan d'asservissemnt de l'Europe pour, ensuite, la liquider en tant qu'unité de décision et haut lieu de culture et d'un pouvoir de type souverain dans le monde occidental. Pour tenir la dragée haute aux Soviétiques, le potentiel nucléaire français et la brigade franco-allemande si chère au coeur du Général auraient largement suffi.

Il y a 13 ans, je lisais dans le Monde Diplomatique : « (...) the present behaviour of the United States is familiar and yet unprecedented. It may lead to the militarisation of the US, the destabilisation of the Middle East and the impoverishment, in every way, of the rest of the world ("Le comportement des Etats-Unis de nos jours est sans precedent. Il peut mener à une militarisation des Etats-Unis, une déstabilisation au Moyen-Orient et la paupérisation du reste du monde", Le Monde Diplomatique, Juin 2003, par Eric Hobsbawm) . C'est à mon corps défendant que je constate que l'auteur était parfaitement dans le vrai : les Etats-Unis entendent semer la pagaille et le désordre pour contrôler tout ce qui se passe en Eurasie. Sans doute ce désir est-il purement rationnel et n'a rien de mystique : c'est que Washington a une peur bleue de se retrouver en marge de l'histoire et de l'économie mondiale. Leur continent n'est pas en mesure de résister à la poussée sino-russe. Et selon les principes de la géostratégie, ils ne peuvent commander le monde, car le vrai centre du Globe terrestre se trouve dans la région de l'Oural (et ce n'est pas le Général De Gaulle qui l'a dit, mais Karl Haushofer, père de la géostratégie et l'un des stratèges hitlériens qui se serait donné la mort après la find e la Guerre, en mars 1946).

A supposer que le pérsident américain fasse tout pour assurer son emprise sur le monde, force m'est de constater que nous nous trouvons dans un état d'équilibre instable et précaire. Les dernières réussites de Vladimir Poutine au sommet du G20 ne feront qu'empirer les choses, car Washington est maintenant littéralement prête à n'importe quelle aventure.

D 'autant plus que, côté macro-économie, les actualités sont encore moins réjouissantes pour nos petits cousins d'Outre-Atlantique : la Russie vient de passer cinquième économie mondiale, juste avant l'Allemagne. Réfléchissez-y : cela s'est opéré nonobstant l'implosion soviétique, la Bérézina sociale qui s'en découla, la perte d'une grande partie de la population par l'exode, la misère des années 90, une criminalité déchaînée et les ministres de Boris Eltsine corrompus jusqu'à la moëlle des os !

L'Allemagne, elle, avait tous les atouts alignés de son côté - à commencer par la récupération de l'Allemagne de l'Est (rendue sans un coup de feu par les Soviétiques : Helmut Kohl n'y a pas cru lorsque Gorbatchev lui en a fait cadeau et fit rentrer ses troupes en URSS). Et lorsque je dis « Allemagne de l'Est » j'entends bien un pays développé, avec ses ressources, son marché de consommation et ses branches d'industrie à commencer par l'énergie.

Deuxième information, aussi tragique pour Washington que la première :  la Chine a dévancé les Etats-Unis. Et pour comble de malheur, il serait très ardu de contester cette information parce qu'elle est livrée par la Réserve Fédérale des Etats-Unis et la Banque Mondiale (The Unz Review : An Alternative Media Selection, China Overtakes US, Russia overtakes Germany, Anatoly Karlin).

A mon sens, la seule chose que Washington puisse faire pour renverser la situation c'est de provoquer une guerre généralisée en Europe. Et comme la Russie est particulièrement stable (prions Dieu qu'elle le reste) aussi bien que ses alliés eurasiens du BRICS l'Inde et la Chine, le glaive pourrait s'abattre sur l'Europe Occidentale. Et c'est là où la provocation islamiste pourrait s'avérer utile aux maîtres de la Maison Blanche.

Il faut se tenir sur le qui-vive. Jamais la situation n'a été aussi périlleuse que de nos jours.

Alexandre Artamonov, Pravda.ru

 

Автор Alexandre Artamonov