Le conflit entre le pape et des cercles conservateurs au sein de l'Église catholique s'affiche désormais publiquement. La gestion autoritaire de François cristallise les tensions au sein du Saint-siège. Elle ne convient pas à l'opposition, relate la journaliste du Monde Cécile Chambraud dans son article intitulé « Au Vatican, la guerre est déclarée ».
L'auteur de l'article rappelle que le 13 février, un groupe de neuf cardinaux a présenté une motion de confiance selon laquelle ils exprimaient « leur plein soutien au travail du pape » et « leur pleine adhésion et appui à sa personne et à son magistère ». Mais ce n'est pas par hasard qu'ils l'ont présentée. C'était « en relation avec des événements récents ».
De quels évènements s'agit-il ? Le 4 février, des affiches avec le visage du pape François ont été étalées sur les murs de la capitale italienne. Le pape y a été accusé de gouverner de manière autoritaire et brutale, en contradiction avec le message central de son pontificat qui se fonde sur la primauté de la miséricorde. Plus tard, ceux qui ont distribué ces affiches, ont diffusé une parodie du quotidien du Vatican l'Osservatore romano se moquant du pape. Qui plus est, le 1er mars, l'Irlandaise Marie Collins, victime d'agression sexuelle de la part d'un prêtre catholique a décidé de quitter la Commission pontificale pour la protection des mineurs. Elle a publié une lettre accusant une partie de curie. Selon Mme Collins, elle a « refusé de coopérer avec la commission contre ce mal (agressions sexuelles) qui porte préjudice à l'image de l'Église catholique dans un grand nombre de pays ».
Marie Collins accuse indirectement la Congrégation pour la doctrine de la foi qui est l'héritière de l'inquisition romaine. Selon elle, la congrégation empêche les enquêtes sur les agressions sexuelles.
Mais le cardinal Gerhard Ludwig Müller a rejeté les accusations de Marie Collins. « Il faut mettre fin au stéréotype selon lequel il y a deux parties au sein de l'Église : le pape qui aspire à la réformer et un groupe d'opposants qui tentent de l'en empêcher », a-t-il déclaré.
Le caractère paradoxal du départ de Marie Collins s'explique par le fait qu'il attire l'attention du public non seulement au conservatisme de la curie mais à la critique à l'adresse du pape François. Certaines organisations anti pedophiles affirment qu'un certain nombre de décisions du souverain pontife les empêche de réaliser leurs programmes. On accuse également le pape d'avoir protégé l'évêque chilien Juan Barros qui avait fermé les yeux sur le révérend Fernando Kardima coupable d'abus sexuels dans les années 1980 et 1990.
Le style de gestion du pape ne fait pas plaisir à tout le monde. Il est sévèrement critiqué pour ignorer l'avis de la curie. Une partie considérable de cette dernière est plutôt hostile au souverain pontife. Ainsi, les tensions s'enveniment au sein de l'Église.
Stanislav Stremidlovsky, spécialiste du Vatican a expliqué dans une interview accordée à Pravda.Ru ce qui se passe aujourd'hui à l'Église catholique.
« C'est une vieille histoire qui dure depuis des années. Elle a été provoquée par une encyclique présentée par François au début de son mandat qui se fonde sur une approche plus humaniste de l'amour et de la famille. Un groupe de cardinaux conservateurs s'est formé en réponse à cette approche. Ils demandaient au pape de préciser certaines hypothèses de son encyclique. Mais leur demande a été passée sous silence du pape qui aurait pu être accusé d'hérésie s'il leur a répondu », a déclaré l'expert.
Il estime que les changements apportés par le pape ont un caractère plutôt positif. Les finances du Vatican sont devenues plus transparentes, le pape lutte contre la pédophilie, des enquêtes sont ouvertes. Mais il y a ceux qui veulent que ces enquêtes ne débouchent sur rien et empêchent le souverain pontife.
« Mais je ne pense pas que l'opposition puisse destituer François comme elle l'aurait fait avec Benoît XVI. Bien que cette version de retraite de ce dernier ne soit pas prouvée, elle n'est pas exclue », a-t-il déclaré.